Comme beaucoup d’enfants, à l’approche des vacances d’été, mes parents se chargeaient de trouver un lieu dans lequel je pouvais résider pendant qu’ils travaillaient. J’avais l’habitude, depuis petit, d’aller passer mes vacances chez mes grands-parents. Celles-ci étaient rythmées par des balades en tous genres, des visites de musées, des jeux de société… De réels moments d’escapades et de bonheur.

Du rêve au cauchemar

De ce fait, pour l’été 2002, je m’étais déjà préparé à passer de magnifiques vacances avec eux. Il n’y avait qu’une chose que je n’avais pas prévue, une chose qui ne m’avait jamais traversé l’esprit tellement cela me paraissait inconcevable. Mes grands-parents avaient décidé de partir en vacances pendant tout le mois de juillet, sans moi. 

“Tu pourrais passer tes vacances chez ton oncle Frédéric cette année, ça fait longtemps que vous n’avez pas passé du temps ensemble” me dit ma grand-mère au téléphone. C’est vrai que ça faisait longtemps mais ça ne me dérangeait pas. Il avait toujours cet air froid, toujours à parler de son usine et de ses convoyeurs à chaîne qui lui facilitaient la vie. Il ne s’intéressait jamais à moi, même pour Noël il s’arrangeait pour ne pas m’offrir de cadeau, ni à moi, ni à personne d’ailleurs. 

“Le travail en usine, c’est pas facile mais ça nous permet de voir le monde autrement… Les mecs de l’usine travaillent comme des acharnés, il n’y a pas plus motivé dans la vie… Tes parents ne comprennent rien, ils sont assis dans leur bureau à stresser pour des pacotilles”, bla bla bla. Si c’était pour entendre ce genre de commentaires, je préférais rester seul à la maison, j’étais suffisamment grand pour ça.

“De toute façon, nous n’avons pas le choix, il n’y a plus de place en colonie à cette période de l’année” m’expliqua mon père. Il ne se rendait même pas compte que mes vacances de rêve se transformaient en cauchemar. Je me sentais trahi, trahi par tous, mes grands-parents qui avaient décidé de me zapper, mes parents qui ne cherchaient qu’à se débarrasser de moi, et cet oncle qui ne m’aimait même pas et qui acceptait de m’accueillir.

Le travail en usine : la découverte d’une vocation

A peine deux semaines passées et me voilà, au fin fond d’une ville inconnue dans laquelle rien ne me paraissait intéressant. “C’est bien que tu sois là petit, tu vas pouvoir découvrir la vraie vie”. Dès le lendemain, il me fit découvrir son lieu de prédilection, l’endroit le plus important de sa vie, son usine. 

Cette usine était gigantesque, je voyais des tonnes et des tonnes de marchandises qui circulaient, dans des palettes, dans des ascenseurs (je comprendrais plus tard qu’il s’agissait de monte-charge) et les fameux convoyeurs à chaînes. 

Mon oncle m’expliqua tout, la chaîne de production, le travail de chaque technicien, il me laissa même manipuler certaines machines. A la fin de ce mois de juillet, à ma grande surprise je me rendis compte que j’avais gagné en connaissance et surtout, j’étais convaincu d’avoir trouvé ma vocation. “Plus tard, je travaillerai en usine, comme tonton Fred”.